Prends de la hauteur, vole, voyage [Antonio]

Premier acte, de la naissance jusqu’à l’arrivée à Miami

Antonio est l’aîné d’une famille de quatre enfants. Et il est le seul garçon. Valentina, seize ans. Natalia, treize ans. Stefania, onze ans. Il est donc le grand frère protecteur de trois jolies jeunes filles. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il n’était pas un enfant désiré. Du moins, pas voulu ni attendu. Sa mère avait seize ans quand elle est tombée enceinte de lui, son père en avait vingt. Entre eux deux, ça a tout de suite été le coup de foudre, et même s’ils ont été heureux d’accueillir un bébé, il n’était pas programmé.
Remontons au départ. Son père était un enfant du voyage. Du monde du cirque, plus précisément. Le cirque dans lequel il a grandi s’établissait à chaque fois pour quelques mois, ce qui est déjà long dans ce milieu-là. Puis, arrivé à Florence, il a rencontré la mère d’Antonio. Elle était jeune et émerveillée par le cirque, elle n’y avait jamais été. Elle est venue plusieurs fois aux représentations, et a fini par demander une sorte de stage d’une journée sous le chapiteau. Pour en apprendre un peu plus sur ce monde. Et c’est lui qui s’est occupé d’elle. On peut dire qu’ils se sont tout de suite plu. Mais ils étaient tous les deux très jeunes. Et elle est tombée enceinte. Elle a donc fait le choix de garder son bébé, et il a décidé de l’élever avec elle. Antonio est né à Florence. Sa mère a rejoint le cirque et ils sont repartis sur les routes quelques semaines après sa naissance. Elle a donc appris au contact des gens qui y travaillaient. Sa mère est costumière et maquilleuse. Douée dans ce qu’elle fait, elle est respectée par les personnes qu’elle côtoie, même si elle n’a pas grandi dans ce milieu.
Mais parlons un peu d’Antonio. Gamin intéressé par tout ce qui l’entoure, il voulait tout faire comme ses parents. Son père est un trapéziste hors pair. Il n’a donc pas peur du vide. Plus petit, il n’avait pas le droit de s’entraîner comme les autres, puisque c’était trop dangereux. Il trainait donc dans les pattes de sa mère. Et a très vite appris comment métamorphoser quelqu’un grâce à du maquillage et des vêtements bien choisis. Observateur, il préfère regarder les autres et enregistrer ce qu’ils font pour réessayer seul, lorsque personne ne le voit se tromper. Il aimait beaucoup apprendre et découvrir de nouvelles chose, mais par lui-même. Il a d’ailleurs gardé cette manie de paniquer lorsqu’il doit faire quelque chose qu’il ne sait pas faire, surtout en présence d’autres personnes. Puis, il est arrivé à un âge où il a eu le droit d’apprendre à faire comme les grands. Son choix s’est très vite porté sur le tissu aérien, même s’il sait faire d’autres choses, dans l’ensemble. Il se débrouille au trapèze, sait marcher sur un fil dans les airs et a des bases en voltige. Mais ce qu’il aime et maîtrise plutôt très bien, c’est le tissu aérien. Il s’y entraîne depuis quelques années. Mais il considère ça plus comme un bonus, et non comme une finalité dans sa vie dans le cirque. Il ne fera pas ça toute sa vie. Lui, ce qu’il veut, c’est aussi découvrir le monde extérieur, apprendre d’autres choses, à son rythme.
Mis à part ça, Antonio n’a pas eu une enfance malheureuse, même s’il a voyagé de ville en ville et n’a jamais connu d’endroit stable. Il y est habitué et aime voir des paysages différents au bout de quelques mois. Il est devenu, au fil du temps, protecteur avec ses petites sœurs, même si elles s’allient souvent pour le faire tourner en bourrique. Chacune d’entre elle a appris certains arts du cirque et il les encourage chaque fois qu’il le peut. Il s’entend particulièrement bien avec Valentina, puisqu’ils n’ont qu’un peu plus d’un an d’écart.
Vers quatorze ans, il s’est découvert une nouvelle passion : la vidéo. En effet, une représentation de son cirque a été filmée, et il a tout de suite été attiré par la caméra. Dès cet instant, il a eu l’envie d’apprendre à réaliser et monter des vidéos. Il a donc économisé et appris des petites combines pour gagner de l’argent. Puis, il s’est acheté une caméra. Il s’est fait offrir un ordinateur. Et depuis, il film dès qu’il en a l’occasion. Pas seulement les spectacles, mais aussi des choses du quotidien, et des trucs qu’il met en scène. Il aime ce qu’il fait, et se donne à fond quand il a une idée de court métrage. Malheureusement pour lui, il n’a pas toujours eu l’occasion de terminer ce qu’il avait commencé, faute de volontaires pour l’aider à faire ce qu’il ne pouvait pas faire seul. Mais s’il y a un projet qu’il a mené à bout et dont il est particulièrement fier, c’est celui grâce auquel il se retrouve à Miami. Il a assuré la promotion de son cirque en postant régulièrement des vidéos d’entraînements, de mises au point de numéros et de représentations. Et le gérant du cirque a été contacté par un homme à Miami. Celui-ci souhaitait établir le cirque là-bas de manière permanente. Voire, si ça ne fonctionnait pas assez bien, de le faire parcourir les Etats-Unis. Il lui a fallu du temps pour accepter, mais il l’a fait.
Antonio a fait part à ses parents de son désir d’étudier dans une école et d’avoir une vie un peu plus stable. Il a donc été inscrit à Wynwood, et si le cirque repart sur les routes, y restera. Le site du cirque n’est pas très loin, mais en périphérie de la ville puisqu’il faut assez de place pour accueillir les installations. Le jeune homme peut s’y rendre quand il veut, que ce soit pour rendre visite à ses parents ou s’entraîner. Il a également une place qui lui est réservée dans la troupe dans son art de prédilection. Les hommes qui maîtrisent le tissu aérien sont minorité.
Côté social, Antonio n’a pas connu que les autres artistes du cirque. Il a été scolarisé dans chaque ville où il a été, et n’a jamais eu trop de mal à s’y faire des copains, même si son niveau scolaire n’a jamais été élevé. Avec l’âge, ça a été plus difficile de tisser des liens forts, mais il lui reste quand même deux ou trois vrais amis avec qui il est toujours en contact. De même, il a eu plusieurs copines, mais jamais rien d’assez fort pour continuer la relation une fois parti loin.
Antonio a hâte de pouvoir enfin poser ses bagages pour plus longtemps que quelques mois. Il espère se plaire à Wynwood, qui est quand même l’école la plus réputée du coin.


Deuxième acte, Miami et départ pour Boston

Que s’est-il passé depuis que je suis à Miami ? Je me suis fait des amis, de très bons amis. Quelques-uns sont partis de Miami, mais beaucoup sont restés. Là-bas, j’ai découvert ce qu’étaient les Etats-Unis. J’ai commencé à vivre un peu sans mes parents, à la confrérie. Je me suis éloigné du cirque. J’ai continué dans mes combines. Je m’en suis bien sorti, j’ai profité de la vie, oui. J’ai participé à des événements de confréries, j’en ai encore appris plus. Mais j’ai aussi raté mon année et j’ai redoublé.
Après mon redoublement, j’ai quitté la prestigieuse école de Miami pour un lycée plus proche du cirque où travaillaient mes parents. Si je ne travaillais pas en étant loin d’eux, j’allais devoir travailler en étant proche d’eux. J’ai réalisé que j’aimais vraiment le cirque, et particulièrement le tissu aérien. Je ne voulais pas en faire ma vie, mais je n’en suis plus aussi sûr maintenant. Oui, ma première année à Miami fut tout ce qu’il y a de plus simple et banale pour un jeune de mon âge.

C’est après que les choses changèrent. Je redoublai ma Senior Year éloigné de mes amis. Je tentais de les voir le plus souvent possible, mais ce n’était pas toujours évident, surtout avec mes parents qui gardaient un œil sur moi. Ils voulaient bien que je sorte, mais à condition que je travaille beaucoup à côté, que j’aie de bonnes notes. Très difficile de tout concilier. Les amis, la famille, les cours, le cirque, avoir un boulot, mes passions. Et très vite, je me rendis compte d’une chose : l’une de mes amis de Miami me manquait terriblement. Emmalee. Je le revoyais régulièrement, malgré tout, mais elle me manquait. Je ne tardai pas à faire ce que je ne penserais jamais faire : lui déclarer ma flamme. Et c’est ainsi que débuta ma première histoire sérieuse. Nous passâmes alors les semaines, les mois suivants à réussir notre seconde Junior Year, Emma ayant elle aussi redoublé. Et enfin, j’eus mon diplôme de fin de lycée.

Emmalee comme moi ne voulions pas rester à Miami, ou du moins, nous aurions bien aimé changer un peu de ville. J’avais mis de l’argent de côté, et Emma avait aussi de l’argent –elle était riche, mais hors de question de vivre sur son argent-. Nous eûmes vent d’un lien entre Wynwood High School et une prestigieuse école de Boston. C’est ainsi que nous décidâmes d’y partir. Nous ne savions pas à quel point les deux écoles se ressemblaient … particulièrement sur ses parts d’ombre. Tandis que je m’inscrivis dans une section de cinématographie et que je me trouvai un petit boulot mettant à profit mes talents pour le tissu aérien, Emmalee partit vers le stylisme.

La rentrée va bientôt arriver, et nous venons de nous installer dans un petit appartement tous les deux, en couple. J’ai déjà commencé à travailler, et les cours ne vont pas tarder à reprendre. Je vais devoir freiner les soirées au cabaret, mais je ne veux pas arrêter pour autant. J’ai besoin du cirque pour vivre. Quel avenir Boston me réserve-t-il, maintenant ?