Trilogie du Mal - Iosep A. Coughlin

Waterville. Petit village, comme son nom l'indique, au bord de l'eau. C'est près des effluves marins que Iosep est né et a grandis, auprès de ses frères et sœurs. Au milieu de sa grande fratrie, Iosep ne sut se démarquer et prendre son indépendance vis-à-vis de sa famille avant le collège. Issu d'un père et d'une mère très croyants, Iosep connait par cœur les épisodes les plus incertains de la Bible. Dans sa chambre, Iosep se souvient. Mary et Aaron dormaient ensemble, au fond. Lui était couché tout en haut d'un lit mezzanine. Au dessous, son grand frère Gabriel. Iosep ne voyait jamais les images. Alors parfois, il se penchait très fort au rebord de son lit et son père s'interrompait dans son récit pour le gronder.

"Iosep ! Il n'y a pas d'image ! Couches-toi, tu vas tomber, comme ça !"

Puis il reprenait. Son père racontait les avenures des apôtres. De Jesus de Nazareth. Dans un silence attentif, la voix de son père vibrait dans sa chair. Une voix douce et grave, avec cet accent caractéristique des habitants de petits villages irlandais. Iosep posait beaucoup de questions. On lui imposait une vérité dont il ne croyait qu'à moitié. Et jamais il ne put recevoir de réponse qui le satisfasse parfaitement. En grandissant et en atteingnant le début de sa très jeune adolescence, Iosep arrêta de croire aux récits de la Bible et décida d'en vouloir à Dieu. Dans cette colère sourde et incompréhensible, Iosep n'était pas encore parfaitement convaincu de son athéisme. Et ne se détachera vraiment de Dieu qu'une fois à l'université.

Au collège, Iosep se tourna vers la dérision de la religion. Là où ses frères et soeurs avaient été de parfaits élèves, très attentifs et pieux croyants, Iosep se mit à écouter du métal et à s'habiller de cuir noir et de chaînes d'acier. D'une brillante intelligence mais cependant perturbateur, Iosep redoubla une fois ses classes pour son comportement de plus en plus anti-conformiste. Il s'interessa de très près à la démonologie, aux sciences occultes et au spiritisme. Dans son petit village de 500 habitants, ils étaient quatre à partager son style et ses revendications. Iosep était encore un garçon heureux.

Son père, plusieurs fois, lui fit comprendre qu'il devait retrouver la voie du droit chemin, d'un revers de la main. Amenant sa petite soeur à le suivre dans ses escapades délictueuses, Iosep fut très vite la brebis galeuse du troupeau. Portant une maladie encore inconnue dans la famille. On considera très vite qu'il terminerait mal. Ses parents ignoraient toutes les questions que Iosep se posait et toute l'intelligence mal dispensée dont il était capable. Iosep était un adolescent très secret avec sa famille pendant longtemps.

Le lycée le rendit plus mûr et respectueux de son prochain. Cependant, toujours dans une révolution instable, Iosep commença à développer une violence étrange. Mué de principes forts et d'une noblesse héritée de son éducation, malgré tout, très ouverte, il fut toutefois le seul Coughlin à se faire interpeller par ses enseignants et surveillants pour provoquer des combats, dans la cour. On ne comprenait pas cette tendance naturelle à la violence. Il se battait pour tout et pour un rien. Une insulte qui fusait, des provocations, Iosep considérait très mal les remarques et les moqueries sur son style et ses goûts. Susceptible à souhait et encouragé par des amis qui possédaient cette même hargne dans le fond de l'âme, agir par les poings fut souvent la meilleure solution trouvée pour se défendre contre l'inculture et l'étroitesse d'esprit des adolescents de son village.

Au milieu du lycée, Iosep connu sa première véritable dépression. Son père avait trouvé un emploi très juteux dans une grande ville du Massachussetts. Le jeune adolescent en voulu beaucoup à sa grande soeur et son grand frère de ne pas les suivre en Amérique. Ils étaient grands et avaient déjà leur vie, leur travail, leur appartement. Iosep comprenait mais il se sentit seul. Il serait désormais l'ainé. Ce titre ingrat dont il ne voulait pas. Quitter ses amis aurait pu être déchirant. Mais le garçon refusa catégoriquement de voir ses camarades de beuverie pour un dernier adieu. Il se connaissait assez pour savoir qu'il serait incapable de leur dire au revoir. A fortiori, de les quitter, après ça.

En arrivant, en Amérique, Iosep fut perdu dans toute cette vaste jungle urbaine. Habitué à la campagne, au sel sur sa peau, à l'air frais des champs et au silence des routes isolées, il ne réussit pas à s'adapter à la grande ville. Iosep se souvenait de leur poulailler, de leur petit jardin d'épices, de la piscine. Il n'y avait pas de bus à Waterville, hormis pour se diriger vers les villages avoisinnants. Le choc culturel fut trop brutal pour lui. Il calma net ses élans de violence et s'il devint un élève très calme et même discret, ses notes flanchèrent sévèrement. Il passait plus de temps sur son téléphone que sur ses études. C'est également à Watertown que Iosep connu ses premiers amours, aux relents tumultueux mais néanmoins très passionnés. Son père espérait que ce fusse ses copines de passage qui l'aideraient à mieux accepter leur nouvel environnement.

Iosep hésita longtemps sur la voie qu'il désirait prendre, après le lycée. Ignorant de toutes les possibilités, malgré un dossier difficile, les notes de Iosep étaient supérieures à celles attendues par les grandes écoles préparatoires. Iosep voulu se tourner vers les arts. La musique et le cinéma, tout particulièrement. Ayant été un enfant de chœur à la choral de sa paroisse, en Irlande, le collège et le lycée firent connaître au garçon un talent prometteur pour la musique et un intérêt particulier pour les arts. Aidé par son père, il l'inscrivit à l'université de Boston. Ayant, à présent, largement les moyens d'assumer les études du jeune homme, Iosep entra à la faculté pour un cursus qu'il aurait voulu artistique.

Vivre dans un campus étudiant, à l'écart de ses parents lui fit faire d'étranges découvertes sur lui-même. Son esprit s'apaisa et son style vestimentaire cultiva un goût plus raffiné et recherché. Se confronter avec d'autres artistes l'aida à nourrir son intellect et sa soif de curiosité. Cependant, si les études entreprises lui firent faire la connaissance de nombreuses personnes avec qui il noua des amitiés sincères, au milieu de l'année, il se rendit compte qu'il n'était pas fait pour étudier la musique classique dans des amphithéâtres plein à craquer. Il passa beaucoup de temps à réfléchir sur les voies qui pouvaient l'intéresser. Et ce fut à la rencontre d'étudiants en psycho qu'il s’intéressa de très près à ce métier qu'il comprenait bientôt comme une passion.

Toute la demi-année de perdue, il la mis au service de son changement de cursus universitaire. Soutenu par ses amis, il réussit en fin d'année, à changer de voie pour entrer en études des Sciences Psychologiques, après un an de découverte universitaire.