Et 1,2,3 Alice Au Pays des Cauchemars...

"Je n'ai pas envie là, de devenir qu'un adulte imparfait" . Ne jamais oublier qui nous sommes, surtout ne jamais oublier ça. Et surtout ne jamais renier. Ne jamais trahir et ne jamais abandonner. Je vis comme ça depuis que je suis née, mes parents m'ont appris à vivre comme çà et puis avec Enzo aussi ça toujours été comme çà, rester fidèle à notre parole et toujours être fiers de nous, toujours un point c'est tout. Mes parents si ils n'avaient pas été du genre solidaires je pense qu'ils ne seraient plus ensemble depuis longtemps et puis il faut assumer ses décisions, toujours, moi il y a quelques semaines j'ai du faire un choix et je m'y tiendrais, attends moi Enzo j'arrive…

Je ne suis pas riche moi, et oui il y a des gens qui ne croulent pas sous la richesse dans notre belle vie de Boston, seulement ces personnes tu refuses de les voir, toi qui est installée sur ton joli lit à baldaquin avec de beaux draps en soie. Alors oui je vais te donner un petit cours d'éducation civique  rien que pour toi, tu vois il n'existe pas que ce petit monde de rose bonbon et de couverts plaqué or que tu connais, il y a un monde qui s'appelle la réalité et moi je suis née là dedans et mes parents aussi avant moi. Ça va je ne t'ai pas encore perdue ? Ni choquée ? Je continue alors, comme je te le disais mes parents ne sont pas nés dans l'or et ils n'ont pas évolué dans ce domaine tu peux me croire, crois moi, après si tu t'en fous c'est pas grave, tant pis pour toi, tu manque une occasion de comprendre ce qui existe autour de toi.

Parce que ces gens là ils ont du bosser dès leur plus jeune âge pour pouvoir aider leurs parents et pour pouvoir manger tout les jours, pour pouvoir vivre sous un toit alors que toi tu as juste à agiter une petite clochette quand tu veux quelque chose. Je ne vais pas te parler de la lutte des classes et de toutes ces choses comme çà, de toute façon je ne crois pas en la politique et à toutes ces conneries, de toute façon ils se font tous du fric sur notre dos c'est tout ce que je vois. Mon père c'est un petit employé de bureau dans une entreprise comme on en voit des milliers de nos jours, il gagne peu mais il s'en contente et surtout il ne demande jamais plus et surtout pas la part des autres, ma mère elle est musicienne dans un petit orchestre local, elle y touche un petit salaire, rien de grandiose mais elle aussi elle se contente de çà. Ils se sont rencontrés dans un bar, pendant une de leur rares sorties le soir. C'est pas glamour hein ? Excuse moi de trouver ça beau. Plus beau qu'une rencontre arrangée dans un rotary club, toute organisée par papa et maman pour trouver le meilleur parti. Tu sais ces belles soirées qui sentent bon le champagne et la magouille, mes parents se sont peut être rencontrés devant une choppe de bière dans un bar qui deviendra plus tard le Sleep No More, mais au moins leur rencontre est de leur propre chef et au moins eux ils s'aiment, pas une histoire sordide d'intérêts.

Pour eux il n'était pas question de quitter Boston. En plus d'être attachés à cette ville, ils vivaient selon ce que leur dicte leur boulot, mon père ne peut quitter son travail et ma mère ne peut pas abandonner son orchestre. Un petit appartement et le strict minimum pour vivre, un rythme de travail très difficile mais ça ne leur empêche pas de savourer chaque instant de leur vie ensemble et même si les factures s'accumulent et si leur vie est précaire il restent fidèles à leurs promesses et à leurs engagements. Si je te dis ça c'est que c'est très engagements. Jamais ils ne se sont trompés, jamais ils n'ont cherché à écraser les autres, ni à trahir leurs proches. Je crois que tu connaîtra jamais çà toi, le bonheur que l'on éprouve en tenant nos promesses. Je suis peut être une sale gosse, qui fait des conneries et autres, mais j'éprouve un profond respect pour mes parents et pour tout ce qu'ils m'ont transmis, même si ce n'est pas un compte en banque bien remplis.

D'ailleurs parlons un peu de moi, tu dois te dire « ouf » parce que je pense que l'histoire de mes parents tu t'en fous et de la mienne aussi, mais tu dois te dire que tu es proche de la fin. Ce n'est pas faux, mais si je te raconte tout ça c'est peut être qu'inconsciemment je me dis que tu peux encore changer un peu. Moi je suis née à Boston en 1997. Mes parents sont toujours dans ce petit appartement, pas plus riches, mais on voit qu'il y a toute une vie dans cet endroit, qu'il y a du vécu, une véritable histoire. Petite je montre déjà mon tempérament, énergique et parfois épuisante pour mes parents qui se démènent pour moi. Ils me font comprendre rapidement que la vie c'est pas rose, qu'il faut rester fort, honnête avec soit et les autres et qu'il ne faut pas essayer de faire comme ceux qui se croient les plus fort, qu'il ne faut pas les écouter. C'est dans ces idéaux que je suis élevée et dans l'idée qu'il y en a qui profitent et qui écrasent les autres, qui se moquent, qui rient du malheur des autres et ces gens là, j'ai appris à les détester et à vouloir me venger. Et j'ai rencontré un jeune garçon, il est comme moi ce garçon, la personne la plus honnête et droite que j'ai rencontrée, oh bien sûr lui aussi c'est un gamin qui aime faire les quatre cent coups, mais au moins lui ne se fourvoie pas, au moins lui il assume tout ce qu'il fait. Ce garçon là, s'appelle Enzo Miller.


C'est pas compliqué, Enzo et moi c'est le petit duo infernal, nous ne sommes que deux gamins, encore sur les bancs de l'école maternelle on sait que quelque chose de très important est né. Nous somme deux véritables terreurs pour nos petits camarades mais nous on se marre bien, à défier ceux qui se croient au dessus, à nous imposer malgré tout, il est le seul à vraiment comprendre ce que je vis et il en va de même pour moi en ce qui le concerne. Et puis il y a comme un jeu entre lui et moi, nous nous faisons des promesses. Sur tout et rien mais nous les tenons. Dont une, ne jamais tomber amoureux. Moi cette promesse même si c'est une promesse de gosse elle me suit tout le temps. Avec Enzo on est toujours fourrés l'un avec l'autre, à rigoler, à ce soutenir lors des coups durs, je sais que j'ai été là quand sa maman a perdu son boulot, c'était normal que je sois là. Tout comme il a été là, quand, à la veille de rentrer au collège j'ai appris qu'on devait partir pour Chicago parce que mon père était muté. Pas le choix, sinon adieu son boulot. Je n'ai pas pleuré même si je le voulais. Enzo me faisait comprendre que ce n'était que passager que l'on se reverrait. D'ailleurs nous avons fait un pacte, notre premier vrai pacte, toujours se tenir au courant et un jour se retrouver. Et ce pacte là je compte bien le tenir Enzo Miller.

Je n'aime pas Chicago, je m'y ennuie ferme. Je ne supporte pas les gens là-bas, pire qu'à Boston. Alors je fais ce que je sais faire le mieux, je fais des conneries, j'emmerde les autres et je me fais remarquer, chaque fois mes parents me recadrent et je m'en veux de les faire tourner en bourrique comme ça. Ma mère a eu beaucoup de mal à quitter son orchestre pour bosser dans une petite radio locale et moi je n'ai pas arrangé les choses en étant une petite fille insupportable, pas avec eux, mais les échos de mes frasques qui leur remontaient suffisaient amplement. Heureusement que j'ai des nouvelles de Enzo assez souvent, des vraies bouffées d'oxygène pour moi, sans lesquelles je serai totalement partie en vrille, mes connaissances pourront en témoigner.

Il y a une chose que je n'avais pas prévu par contre. La visite des services sociaux et bancaires. J'ai dix-sept ans et je serai majeure dans quatre ans. C'est vrai que la situation financière de mes parents s'est dégradée ces derniers temps mais je ne m'en suis pas rendu compte, je n'ai toujours connu que ça. Alors qu'on vienne me dire que mes parents ne peuvent plus subvenir à mes moyens que je devais partir et qu'une décision de justice me nomme mineure émancipée, à la charge du pays ça me détruit totalement. Toute mon enfance j'ai cherché à être indépendante, et maintenant qu'on me disait que je l'étais, je n'en voulais pas. Mais je n'avais pas le choix, on m'arrachait à mes parents comme çà, on me donnait une bourse pour mes études, comme pour faire passer la pilule, mais ça ne passe pas. Cette fois si je pleure, parce que c'est trop pour moi. J'ai un choix, ma destination. Aucune hésitation, Boston. Enzo, j'espère que tu tiens toujours tes promesses parce que j'ai plus que jamais besoin de toi.